Si l'on en croit le journal la Croix, 54 % des Français sont contre la publication des caricatures de Mahomet. 54 %, c'est pour l'essentiel le score de la peur. Si on avait pu faire un sondage sous l'Occupation, nul doute qu'on aurait trouvé 54 % des Français, voire bien plus, pour désavouer les résistants.
C'est ainsi que s'exprime salutairement Daniel Leconte, producteur-réalisateur, lauréat du prix Albert-Londres,[1] dans le journal Libération, suite aux réactions violentes des extrèmistes religieux dans le monde entier aux caricatures danoises de Mahomet, mais surtout suite aux non réactions des politiques, responsables religieux et médias européens. Car il faut bien remarquer que la plupart des médias européens et arabes n'ont guère défendu farouchement leur liberté d'expression ! Dans ce concert de lacheté face à l'intégrisme, et dans ce recul général de la laïcité et cette menace des athéistes, quelques rares journalistes sortent du lot, à commencer par Charlie Hebdo, en France, qui, en plus de ne pas s'écraser face à l'obscurentisme, a publié dans ses deux derniers numéros des analyses fort pertinentes. C'est justement à Charlie Hebdo que Daniel Leconte rend homage, allant même jusqu'à déclarer :
Et, puisque la grandeur de ce métier est de porter la plume dans la plaie, j'émets le voeu que les confrères fassent de vous les lauréats du prix Albert-Londres.
Si en Europe ces médias sont rares, que dire alors dans le monde arabo-musulman ? Les journalistes qui ont eu le courage de s'exprimer là-bas méritent toute notre estime et notre soutien.
Connaissez-vous ces noms : Jihad Momani, Hicham al-Khalidi ?... Deux noms parmi d'autres, qui ont osé publié les caricatures blasphématoires, et qui risquent aujourd'hui au mieux la prison au pire le lynchage d'une foule abrutie de haine. Il faut bien l'avouer : ceux-là ont eu beaucoup plus de courage que la plupart de nos journalistes et politiques européens. Nous nous devons de les soutenir !
Jihad Momani a signé un éditorial intitulé "Musulamans du Monde, soyez raisonables !" dans son magazine jordanien Shimane, et ose afirmer, (sacrilège !) que les égorgeurs d'otages ou les kamikazes causent plus de tort à l'islam que ces caricatures. Immédiatement il se voit obligé de démissionner, il est convoqué pour réprimande par le syndicat de la presse (!), puis il est arrêté pour "atteinte au sentiment religieux" et se voit obligé de faire des excuses publiques...
Hicham al-Khalidi, quant à lui, est le rédacteur en chef du tabloïd Al-Mehwar et est également arrêté pour y avoir reproduit les caricatures... Tous deux risquent trois ans de prison.
Quel courage ont eu ces hommes, et bien d'autres : au Yémen, l'hebdomadaire Al-Horreya a été suspendu, et son rédacteur en chef mis en examen. Même cas de figure au Maroc pour le quotidien arabophone Al-Nahar al-Maghribia. De quoi faire honte aux chefs d'états européens qui n'ont pas soutenu le Danemark et qui n'ont pas protesté face aux incendies de leurs ambassades ! Honte à eux !
Honte aussi au Conseil Français du Culte Musulman, qui ferait mieux de condamner ces incendies au lieu de poursuivre en justice Charlie Hebdo et de traiter les auteurs de ces caricatures de négationistes ! Ils sont prets à tout pour récupérer la colère des fidèles. Quand je pense que notre Etat finance aussi ce genre d'institutions, en plus d'autres ! Belle leçon de laïcité !
Heureusement qu'il existe des hommes et des femmes qui sont là pour dire que le monde arabo-musulman n'est pas condamné à cette dictature de la religion, et qu'il s'en sortira comme la France s'en est sortie ! L'interview d'Ayaan Hirsi Ali, parlementaire néerlandaise, d’origine somalienne, qui a collaboré avec Theo van Gogh à la réalisation du film controversé “Submission” remet d'ailleurs bien les choses à leur place en affirmant que le prophète Mahomet ne peut plus être un modèle de bonté dans notre société évoluée actuelle !
Et qu'on vienne pas nous dire que cette histoire de caricatures provient du fait qu'en pays d'islam, les valeurs en sont pas les mêmes et que le blasphème est une chose extrèmement importante ! Mensonge ! Les musulmans, comme tout le monde, adorent blasphémer ! C'est Guy Sitbon qui le rappelle d'ailleurs cette semaine dans Marianne, l'injure la plus courante qu'on puisse vous faire est la suivante :
Naa din oualdik !
Ca sonne bien ! Et ça peut se traduire par "Nique la religion de ton père".
Notes
[1] Le prix Albert-Londres couronne, en France, le meilleur reporter de l’année en presse écrite depuis 1933 et audiovisuelle depuis 1985.
