Dans l'édition du 1er avril 2005 du Monde, Hervé Kempf revient sur "L'évaluation des écosystèmes pour le Millénaire", effectuée par plus de 1 300 scientifiques réunis par l'ONU à propos de l'état des écosystèmes de la planète. Si le rapport est très pessimiste en ce qui concerne l'état de notre planète, en démontrant par exemple que 60% environ des bienfaits que procure l’écosystème mondial pour soutenir la vie sur terre (eau douce, air pur et climat relativement stable) sont en voie de détérioration ou utilisés de façon non viable, les scientifiques laissent une porte ouverte à un meilleur futur en soulignant que ce sont les politiques appliquées à l'échelle mondiale qui détermineront notre avenir. A partir de ce constat simple, quatre scénarios différents ont été imaginés, selon que notre Monde futur privilégiera, pour simplifier, la sécurité, le commerce, la technologie ou l'éducation.
- La sécurité : scénario "Ordre venant de la puissance"
C'est le scénario en cours depuis les attentats du 11 septembre : impératifs sécuritaires, protectionisme, replis sur soi, les puissances sont focalisées sur leurs intérets régionaux. C'est clairement le pire des scénarios, car c'est avec celui-ci que la démographie sera la plus forte, et que la sous alimentation augmente (+ 10% en 2050). On sent bien que les scientifiques ont voulu épingler la politique américaine actuelle avec ces prédictions catastrophiques.
- Le commerce : scénario "Orchestration globale"
C'est le scénario de la mondialisation et de la globalisation, moins pire cependant que le premier. Libéralisation totale, barrières commerciales abolies, subventions annulées. Les domaines en forte croissance sont ici les infrastructures, la santé et l'éducation. C'est dans ce scénario que globalement les pays en voie de développement connaissent la plus forte croissance. Cependant, ce scénario est catastrophique en ce qui concerne les valeurs culturelles et la destruction des écosystèmes. Si les pays en voie de développement choisissent de nous copier et d'adopter une forte croissance, c'est la fin programmée de l'humanité.
- La technologie : scénario "Techno Jardin"
Dans ce scénario aux forts investissements technologiques, on fait confiance à la Science pour résoudre les problèmes écologiques, vu ses énormes moyens mis en oeuvre. Dans ce scénario, "les groupes qui assurent le maintien des services écosystémiques sont rétribués. Ceci assure un développement aussi bien des pays industrialisés que pauvres, et un maintien des capacités de régulation des écosystèmes. Mais les valeurs culturelles sont en déclin, affectées par l'influence de la technologie."
- L'éducation : scénario "Mosaïque d'adaptations"
C'est le scénario préféré par les 1300 scientifiques. L'activité politique et économique est centrée sur les écosystèmes à l'échelle régionale. 13 % du PIB mondial est consacré à l'éducation contre 3,5 % actuellement. Ceci conduit à des résultats positifs sur tous les paramètres, même si la croissance est plus faible que dans le scénario "Techno Jardin". Mais le "tout pour la croissance " n'est-il pas aujourd'hui dépassé ?
On s'apperçoit assez bien que ces scénarios se combinent souvent entre eux, parce qu'il est très difficile de simplifier les politiques en place sur notre planète. Cependant, seul le premier scénario sécuritaire semble en ce moment avoir lieu. Pour notre avenir, il serait souhaitable que l'on glisse petit à petit vers des scénarios moins catastrophiques pour notre survie, et si possible adopter le dernier et le meilleur d'entre tous. L'éducation, surtout dans les pays en voie de développement, devrait être la priorité face aux obcurentismes grandissants. Dans le contexte actuel, je donne très peu de chance que ceci se réalise... Mais, après tout, on peut rêver ? C'est à peu près tout ce qui nous reste à faire...